1. / Les droits d’auteur font partie de la famille des droits de propriété intellectuelle.
Pourquoi « intellectuelle » ? Parce que la musique (paroles et/ou mélodies) fait partie de ce que l’on appelle les « oeuvres de l’esprit ». Elles n’ont pas de consistance matérielle (pas comme une voiture, une maison, une baguette de pain), mais elles existent néanmoins. Elles sont réelles et, aussi bizarre que cela puisse paraître, on peut en être propriétaire.
Dans la musique, l’auteur est propriétaire des paroles qu’il a écrites. Le compositeur est propriétaire de la musique qu’il a composée.
2. / Juridiquement, l’auteur et le compositeur sont des auteurs.
Dans la musique, le compositeur est un auteur au sens juridique, même s’il n’écrit aucun texte. Et l’auteur des paroles… est également auteur donc. Juridiquement, on ne distingue pas la création du texte ou de la musique. Ce sont les mêmes droits.
Quand j’écris « auteur-compositeur », ça peut être juste un auteur ou juste un compositeur, c’est pareil. Et je précise que j’emploie le masculin par commodité d’écriture et de lecture, mais au féminin, c’est la même chose évidemment.
3. / Il ne faut pas confondre la propriété d’une œuvre avec la question de la preuve.
En droit, quand on dit qu’il faut protéger ses oeuvres, ce n’est pas pour devenir propriétaire, puisqu’on est considéré comme tel dès la création. Mais, c’est pour prouver qu’on est bien le premier créateur de cette oeuvre.
Dès lors que l’auteur est considéré comme le premier créateur, il est protégé par le droit d’auteur – à condition que ce soit une oeuvre originale (c’est-à-dire qui porte la marque de l’auteur, son empreinte – aucun rapport avec une quelconque excentricité).
4. / Le droit d’auteur est le droit d’autoriser ou d’interdire l’exploitation de son œuvre.
Tout simplement 🙂
Ça veut dire que pour pouvoir diffuser le travail d’un auteur-compositeur (que ce soit les paroles, la musique, ou les deux ensemble), il faut avoir obtenu son autorisation.
5. / Les droits d’auteur se composent de 2 types de droits : les droits PATRIMONIAUX et les droits MORAUX.
6. / Les droits PATRIMONIAUX permettent d’autoriser l’exploitation de son œuvre contre rémunération
Les droits patrimoniaux constituent le patrimoine de l’auteur-compositeur.
Chaque fois que quelqu’un va vouloir exploiter son travail, il faudra qu’il obtienne l’autorisation de l’auteur-compositeur et qu’il le rémunère.
Il y a principalement deux manières d’exploiter la musique :
► On peut exploiter l’oeuvre en la fixant, la reproduisant sur un support comme on dit (l’imprimer, l’enregistrer) = si quelqu’un veut imprimer ou faire enregistrer sur cd, dvd, fichiers numériques, etc, la musique et/ou les paroles de l’auteur-compositeur, il doit obtenir son autorisation. Et la plupart du temps : le payer.
C’est ce qu’on appelle le DROIT DE REPRODUCTION.
► On peut aussi exploiter l’oeuvre en la communiquant à un public = si quelqu’un veut interpréter l’œuvre devant un public, la diffuser auprès d’une audience (quel que soit le canal : sur scène, dans la rue, à la radio, à la télé, sur internet…), il doit obtenir l’autorisation, et éventuellement payer.
C’est ce qu’on appelle le DROIT DE REPRÉSENTATION.
Dans quasiment tous les contrats de la musique, tu verras la mention de ces deux droits. Ils constituent le fonds de commerce, le patrimoine des auteurs et des compositeurs. Ce sont ces deux droits que les créateur monétisent en réalité.
Je t’invite à lire sur le blog, ou plutôt à regarder la vidéo extraite du cours Accord Parfait, où j’explique ce que sont Les droits patrimoniaux dans la musique.
7. / La durée des droits patrimoniaux est limitée
La spécificité des droits de propriété intellectuelle c’est qu’ils sont limités dans le temps.
Au bout d’un certain moment, on ne peut plus toucher d’argent de leur exploitation. On dit que les oeuvres “entrent”, “tombent” ou “s’élèvent” selon les points de vue, dans le Domaine Public.
Actuellement, la duré maximale des droits patrimoniaux est de 70 ans à compter de la mort du dernier des co-auteurs ou co-compositeurs. C’est-à-dire que l’œuvre génère des revenus toute la vie de l’auteur-compositeur et jusqu’à 70 ans après sa mort.
Chaque année, des sites comme l’Avent du domaine publique ou le site Gallica de la BNF pour la littérature publient la liste des oeuvres qui arrivent dans le domaine public (donc que n’importe qui peut reprendre ou diffuser sans payer de droits d’auteur).
J’en parle plus longuement, avec des exemples concrets et des schémas animés, dans le cours en ligne Accord Parfait, sur les Fondamentaux du Droit de la Musique.
8. / Les droits MORAUX ne sont pas d’ordre pécuniaire
La loi française accorde également aux auteurs un droit moral qui, lui, n’est pas d’ordre pécuniaire. Donc, on ne le vend pas, on ne le monnaye pas.
Le droit moral offre aux créateurs :
▶︎ le droit de faire ce qu’il veut de son oeuvre, y compris la laisser dans un tiroir : c’est le droit de divulgation.
▶︎ le droit de refuser que son oeuvre soit altérée ou transformée : c’est le droit au respect de l’oeuvre.
▶︎ le droit d’avoir toujours son nom ou son pseudo indiqué sur l’oeuvre, ou de rester anonyme : c’est le droit de paternité.
Contrairement aux droits patrimoniaux, le droit moral est perpétuel.
Ça veut dire que, même quand l’oeuvre entre dans le Domaine Public, et qu’on n’a plus besoin de payer pour la jouer par exemple, il faut quand même respecter le droit moral de l’auteur (qui sera généralement exercé par ses héritiers).
9. / L’objectif fondamental de l’auteur est de diffuser son oeuvre.
L’objectif que va poursuivre un auteur-compositeur toute sa vie durant est donc de diffuser et d’exploiter au maximum chacune de ses oeuvres.
Parce que chaque fois qu’une des ses oeuvres est jouée, diffusée, il va toucher une rémunération grâce aux droits de représentation et droits de reproduction qui sont attachés à l’oeuvre dont il est propriétaire.
Pour l’aider dans la réalisation de cet objectif, il peut demander l’aide d’un éditeur musical. Ils vont signer ensemble un contrat de cession et d’édition musicale, et éventuellement un pacte de préférence.
10. / La gestion collective des droits
En France, la SACEM est l’organisme de gestion collective qui gère les droits d’auteur issus de la diffusion de la musique : à la radio, à la télévision, sur les plateformes de streaming et de téléchargement, et dans tous les lieux publics. La quasi totalité des auteurs-compositeurs et des éditeurs de musique en sont adhérents. Mais je rappelle que ça n’est PAS obligatoire.
Voilà pour les quelques points indispensables à connaître sur les droits d’auteur dans la musique.
Si tu as des questions, des remarques : n’hésite pas à laisser un COMMENTAIRE sous l’article
Et si l’article t’a été utile, tu peux me le faire savoir en cliquant sur le merci !
La lecture de cet article t’a donné l’envie de mieux comprendre le droit de la musique ?
Mais tu te rends compte que tout·e seul·e, c’est pas facile du tout.
Tu aimerais être guidé·e sur ce chemin un peu tortueux ?
Alors, n’hésite pas à rejoindre le cours en ligne Accord Parfait !
14 réponses
Bonjour, je déterre un peu l’article mais il est plutôt intéressant !
dans une entreprise le logiciel de téléphonie permet de mettre n’importe quel MP3 qui sera lancé comme sonnerie (et qui donc retenti pendant 5 ou 6 secondes le temps que la personne ne décroche)
est ce que cette utilisation est soumise au droit d’auteur ?
est ce que les utilisateurs peuvent aller chercher a gauche et a droite des mp3 commerciaux pour les utiliser ?
ou est ce que j’ai raison d’interdire strictement cette utilisation ?
Merci pour l’éventuelle réponse et pour la clarté de vos rédactions !
Salut Eric,
Tu as bien compris, il n’est pas permis d’utiliser une musique pour en faire une sonnerie de téléphone sans autorisation des ayants droit (auteur-compositeur via leur éditeur s’ils en on un + autorisation du producteur de l’enregistrement).
Donc oui bien sûr toute utilisation qui modifie, transforme, dénature une oeuvre ou un enregistrement est soumise à autorisation au titre des droits d’auteur/droits voisins.
Bonjour,
Je suis auteur – compositeur de musiques pour de la vidéo (son à l’image…).
Je produit pour les entreprises, studio vidéos etc…
Quel est l’organisme de gestion des droits d’auteur auquel je devrait m’inscrire pour me protéger au maximum ?
Bonjour Valentin,
En tant que compositeur, c’est à la SACEM que tu dois adhérer.
Plus d’info par là : https://createurs-editeurs.sacem.fr/adherer
Bonjour,
merci pour les infos claires et précises.
Est-il possible pour un artiste interprète de reprendre un court extrait d’une chanson d’un autre artiste (auteur-compositeur) sans déclarer ni payer la SACEM ?
Dans le cas où il a obtenu l’autorisation en amont pour la reprise (mais pas pour la “non-déclaration”)
Ça dépend de ce que tu veux faire.
Si c’est pour une synchro par exemple et que c’est un auteur-compositeur-interprète autoproduit qui t’a donné son accord (par écrit) pour une utilisation gratuite de l’extrait, a priori ça serait ok (par contre, s’il y a d’autres intervenants, un producteur ou un éditeur par exemple, il faudra aussi leur accord).
Pour d’autres types d’utilisation que la synchro (enregistrement d’une reprise et diffusion en streaming, interprétation sur scène, etc.) c’est plus délicat et ça dépend des modes de diffusion de la musique (la Sacem gère certaines exploitations, mais pas d’autres).
J’en parle en détail dans ma formation Accord Parfait
Si tu as un doute, je t’invite à poser la question directement à la Sacem.
Voilà, j’espère que ça t’aide un peu
Bonjour,
Merci pour cet article complet et facile à lire.
Qu’en est il des extraits de chanson? Est-il possible par exemple de reprendre certains passages courts de chansons sur des t-shirts destinés a la vente?
Maria
Bonjour Maria,
Utiliser gratuitement une partie du travail de quelqu’un d’autre pour soi-même l’exploiter commercialement n’est pas permis en France : c’est précisément la raison d’être du système des droits d’auteur.
Donc non tu ne peux pas reprendre des extraits de chanson pour les imprimer sur des t-shirts : il te faudra obligatoirement l’accord de l’éditeur musical (s’il y en a) et celui de l’auteur des paroles. Tu trouveras ces infos dans le répertoire des oeuvres de la Sacem.
Ah ! Une exception néanmoins : les oeuvres entrées dans le domaine public. Dans ce cas, il n’y aura rien à payer pour l’exploitation, par contre, il faudra tout de même demander l’autorisation des ayants-droit de l’auteur (au titre de son droit moral => parce que son travail est modifié, transformé => il faut vérifier que ça ne heurte pas le respect dû à l’oeuvre de l’auteur).
Voilà ce que je peux te dire,
Si tu veux approfondir ces notions, c’est précisément les questions que j’aborde dans le cours en ligne Accord Parfait.
Bonjour, merci pour toutes les informations, j’ai une question, en effet j’ai composé une musique dune série pour une chaîne de télévision en France, ils m’ont payé, récemment ils ont fait une soirée de remise des prix pour les journalistes en diffusant toutes les musiques de leurs séries qu’ils ont produit dont ma musique, ma question est la suivante: est-il ont le droit de diffuser ma musique sans mon autorisation et sans me rémunérer, sachant qu’ils vont produire aussi un clip qui présente toutes les musiques de leurs séries dont ma musique, merci pour votre attention.
Bonjour Alexandre,
Personne n’a le droit de diffuser le travail de quelqu’un d’autre sans autorisation.
Par contre, tu dis qu’ils t’ont déjà payé. Si c’est une chaîne de télé, ils ont certainement dû te faire signer un contrat non ? (contrat de commande + cession des droits d’exploitation).
Pour plus d’info sur ces contrats, j’ai écrit un article ici : Compositeur de musique : Quels contrats signer et Comment se faire payer ?
Il est vraisemblable que les autorisations d’exploitation aient été prévues dans ce contrat. Pour ce qui est des rémunérations pour ces diffusions, soit un forfait était prévu à la base (inclus dans ta première rémunération), soit tu recevras des revenus via la Sacem pour chaque diffusion.
Bonjour, tout est très précis, merci 1000 fois.
Je souhaite me lancer seule avec une chanteuse. Je suis auteure compositrice- elle est artiste-interprete.
Si j’ai bien compris, même en autoproduction il faut signer un.contrat d’artistes. J’ai un statut micro entrepreneur de production audiovisuelle. Est – ce que je peux utiliser ce statut ou dois-je créer une association ?
Imaginons le cas de figure ou nous postons les clip en ligne qu’on se fait maison en ligne, que j’enregistre tout à la maison et que nous mettions ca sur youtube. Quel est vraiment le risque pour moi et la chanteuse ? Merci
Salut Karine,
Merci pour ton message !
La signature du contrat d’artiste ou la question de la structuration ou même les “risques” dont tu parles, dépendent d’abord de la réponse à une question à laquelle vous devez répondre ensemble :
QUI est productrice des enregistrements ?
Pour ça, je vous invite toi et ton amie à lire ces articles pour bien comprendre l’importance de la question :
– Un Producteur phonographique : C’est Quoi exactement ?
– Artiste-interprète : Comprendre ses droits pour devenir pro
Voilà j’espère que ça va t’aider un peu !
Bonjour,
Lorsqu’un artiste fait appel à un arrangeur en lui présentant uniquement sa ligne de guitare et de chant et que l’arrangeur enrichit le morceau en y rajoutant des lignes d’instruments (batterie, basse, 2nd guitare) qu’il compose, comment doit on considérer l’arrangeur qui a malgré tout composé pour enrichir et permettre de finaliser l’oeuvre ? Peut il et Comment doit il être déclarer lors de l’enregistrement de l’oeuvre à la sacem ?
Je n’ai qu’un conseil pour toi : APPELLE LA SACEM !!
Je m’adresse à toi et à toutes celles et ceux qui se posent ce genre de questions : contactez la SACEM , n’hésitez pas, que ça soit par mail ou par téléphone. Cela fait partie de leur travail que de répondre à ce genre de questions. Surtout que ce sont ses propres membres qui lui demandent et qu’il s’agit de faire un dépôt d’oeuvre chez elle.
Ça fait partie de ses missions, c’est aussi à ça que sert la commission qu’elle prélève sur les droits d’auteurs des auteurs-compositeurs.
J’insiste parce que je sais que de nombreux artistes/auteur-compo pensent que c’est impossible de les contacter, c’est faux.
En plus, les questions liées aux arrangements sont complexes, c’est normal de galérer à trouver des réponses, parce que c’est souvent aussi au cas par cas.
A priori, dans ton cas, il est possible que l’arrangeur soit déclaré à la fois comme co-compositeur et comme arrangeur. Mais je t’invite vraiment à te rapprocher de la Sacem pour faire part de ton cas précis.
Voilà !
J’espère que ça t’aide un peu
Et si le coeur t’en dit, sache que ça serait hyper intéressant pour nous tous que tu partages ce que la Sacem t’as dit et ce que tu vous avez décidé de faire ! 😉
A bientôt !