Signer un Contrat avec un LABEL : Conseils pour bien NÉGOCIER (#3)

On n'attrape pas des poissons avec des fraises à la crème! C'est le troisième conseil pour bien te préparer à une négociation et adopter le bon état d'esprit.
PDF
Bienvenue à toi
Bienvenue à toi

Je suis Jennifer ESKIDJIAN
Juriste ~ Formatrice en Droit de la Musique
Fondatrice du site à ContreTemps

Tu veux éviter les pièges ? Tu as peur de te faire avoir et de signer un deal désavantageux pour toi ? Alors prépare toi avant de signer quoique ce soit !

On l’a vu, pour bien se préparer à négocier, il faut d’abord adopter le bon état d’esprit.

Pour ça, il est essentiel d’oser poser des questions. C’était mon premier conseil.

Le deuxième conseil que je te proposais était celui de bien définir tes objectifs avant de commencer une négociation ou de signer un contrat.

Dans ce nouvel article, je te partage mon troisième conseil.

Conseil #3 : Renseigne-toi sur ton interlocuteur

Dans la négociation, ne l’oublions pas, il y a toujours au moins deux parties. 

C’est vrai que je t’ai dit de commencer par bien définir TES propres objectifs (ce qui est non-négociable pour toi, tes ambitions, tes valeurs…). C’est la base et c’est un travail indispensable si tu veux éviter de te retrouver piégé·e dans un deal pourri.

Mais n’oublie jamais l’objectif de la personne en face de toi.

Se poser la bonne question

Il y a une chose sur laquelle j’insiste beaucoup.

C’est la question-clé à toujours garder en tête quand tu prépares une négociation avec un label, un rendez-vous avec une banque ou même quand tu montes un dossier de financement, c’est :

POURQUOI quelqu’un va donner de SON argent, SON temps, SON énergie pour que JE puisse, MOI, réaliser MON projet, MON rêve ?

Tu te rappelles ? J’en parle dans mon article sur le Tue-Business dans la série des Mythes & Bullshits de la Musique.

Pourquoi une personne va t’aider à réaliser TON objectif, TON rêve ? 

C’est parce que t’aider à réaliser TON objectif va lui permettre de réaliser SON objectif à elle !

 

Oui, je sais, c’est pas un scoop.

Mais on l’oublie souvent. 

Or, c’est un élément essentiel à prendre en considération avant une négociation.

C’est souvent la botte secrète des femmes et hommes d’affaires de génie et des négociateurs chevronnés.

Oui, ils adaptent leur présentation, leur négociation en fonction de leur interlocuteur.

Et apporter la réponse adéquate

Si tu veux obtenir quelque chose (en l’occurrence tu veux signer avec un label, conclure un deal avantageux pour toi), tu dois prendre en considération les intérêts de la personne (et de la société) avec laquelle tu négocies pour pouvoir t’assurer que TU LUI PERMETS bien de répondre à SES propres objectifs.

Et c’est là, la clé.

La réponse que tu es capable d’apporter à ses doutes sera TA botte secrète.

Et la question fondamentale qu’ils se posent en face, c’est quoi ?

Est-ce qu’il ou elle (donc toi) va pouvoir me permettre d’atteindre mes objectifs de chiffres d’affaires, de reconnaissance, de réputation, de survie économique…?

Donc ton job est de bien identifier les objectifs de la personne et de la société qui sont en face de toi. De vérifier qu’ils sont en harmonie et en adéquation avec TES objectifs.

Et, si c’est le cas, trouver les bons arguments pour montrer au label que tu peux les aider à réaliser leurs objectifs.

Inspire-toi du marketing !

En fait, en y réfléchissant un peu, je me suis rendue compte que c’est la base même du marketing.

Et ce que je te dis là pourra te servir non seulement pour bien négocier des contrats à ton avantage, mais également t’aidera à réussir tes campagnes de crowdfunding, trouver des associés ou même agrandir ta communauté de fans. Le fait de te poser cette question-clé pourra t’aider dans n’importe quel projet.

Comment penses-tu que les dirigeants et les équipes marketing des grandes marques ont NÉGOCIÉ avec nous, les consommateurs, pour nous CONVAINCRE et nous VENDRE leurs produit ?

Pourquoi n’essaierait-on pas de s’en inspirer ?

Le PDG de Coca, de McDo ou de Zara est-il venu nous voir en nous disant : “Achète mon produit STP comme ça je pourrais réaliser mon rêve de m’acheter une île paradisiaque en Polynésie et de manger tous les jours dans des restaurants 3 étoiles ?”

Bien sûr que non.

Qu’est-ce qu’ils se sont dit ?

L’exemple de Coca-Cola

Pourquoi quelqu’un va payer pour boire une boisson de couleur caca, trop sucrée, trop calorique, trop gazeuse, avec de graves risques pour sa santé ?

Savoure l’instant avec une jolie serveuse en soutien-gorge

#Kiss Happiness…? Sérieusement ? Tu vois le rapport avec une boisson gazeuse qui fait roter et donne le diabète ? Moi non. 🙂

… 

Tu vois ce que je veux dire ?

L’exemple de Nike

Pourquoi quelqu’un va payer 100 € des baskets de médiocre qualité, qui vont se bousiller au bout de 6 mois, fabriqués par des enfants-esclaves au Bengladesh pour 25 centimes de l’heure ?

nike_justdoit

Parce qu’on te dit de le faire…

What ???

Si tu veux tu peux, surtout si tu portes un legging et des baskets Nike

Bon je pourrais continuer longtemps, j’adore cet exercice 🙂 mais je pense que tu as compris.

Penses-tu que pour te convaincre de LEUR donner TON argent, ils te parlent d’eux ?

Est-ce qu’ils te parlent de leurs rêves de s’acheter une villa aux Bahamas, ou d’être l’entreprise la mieux cotée à Wall Street, ou d’avoir les plus grosses parts de marché ?

Regarde bien. Ces marques ne parlent ni leurs besoins, ni de leurs objectifs, NI MÊME DE LEURS PRODUITS en réalité !!!!

Ils se mettent à ta place, dans ta tête.

Leur but est de te convaincre qu’en achetant leur produit (donc en LEUR donnant TON argent), cela va t’aider à réaliser TES RÊVES, tes projets, tes envies…

Et selon eux, c’est quoi nos rêves ?

Avoir l’air cool, être reconnu, se faire plaisir, profiter de la vie, être à la mode, s’amuser, plaire, séduire… What else ?

Peu importe si c’est en achetant des baskets, un sandwich ou un t-shirt.

D’ailleurs, McDo pourrait vendre des baskets, Coca des Tshirts, Nike des burgers, ça serait pareil.

Franchement, je me dis que s’ils sont arrivés à ce niveau dans leur business c’est qu’ils ne se trompent pas complètement.

Même si je n’aime pas du tout ces marques, que leur façon de communiquer ne me parle pas, je ne peux qu’admirer et féliciter cet art du marketing.

C’est une merveille. Utilisée pour vendre de la merde, c’est dommage. Mais néanmoins cette compréhension du mécanisme de vente est prodigieux.

 

Est-ce que tu vois le rapport avec les contrats de la musique ?

Une négociation est un ÉCHANGE

Quoi que tu fasses dans la musique (que tu sois musicien, musicienne, manager, jeune producteur, productrice, booker…), tu es toujours en train de négocier et d’essayer de VENDRE ce que tu fais. C’est la base des échanges économiques.

Et quand tu veux conclure un deal avec un label, ça veut dire que tu veux lui vendre tes idées, tes projets, ton groupe, ton potentiel de développement.

Tu veux le convaincre de quelque chose. 

[Je me relis, aujourd’hui en janvier 2024, et je crois que je nuancerais un peu plus cette phrase. Il ne s’agit pas tant de convaincre que d’exposer ses projets & ses intérêts et de vérifier qu’ils sont en phase avec ceux de la personne avec qui tu cherches à collaborer.

Donc, même s’il ne s’agit pas de convaincre ou de prouver quoique ce soit, disons qu’il y a  une rencontre entre deux “sphères économiques” différentes et qu’il va falloir se parler pour voir s’il y a des intérêts communs]. 

 

Et donc, cela implique de toujours prendre en considération la personne que tu as en face de toi.

Parce qu’il s’agit d’un échange.

 

C’est FONDAMENTAL de garder bien ça en tête quand tu commences une négociation et ce, à mon sens, pour 2 raisons principales :

Il est plus facile de poser des questions

Plus tu as conscience que c’est ÉCHANGE, moins tu es tenté de ne parler que de toi, de ce que tu veux, de tes objectifs. N’assomme pas l’autre avec tes inquiétudes et tes doutes. Discute avec l’autre pour essayer de répondre à SES doutes et à SES questionnements.

Donc se rappeler qu’on est dans un échange, nous incite à faire parler l’autre, le questionner, essayer de le comprendre. Donc il est plus facile de poser des questions aussi !

En face, la personne doit sentir qu’il s’agit d’un échange réciproque (oui c’est un pléonasme, mais il est utile).

Et ça vaut également si c’est toi “l’autre” ! Si tu es en face de quelqu’un qui ne parle que de lui, ne te pose aucune question, ne s’intéresse pas à tes difficultés, tes intérêts, tes valeurs, tes ambitions… je me demande comment on peut avoir envie de collaborer avec quelqu’un qui ne s’intéresse pas du tout à nous ? 

J’en parle dans mon article : Le Tue-Business

Il est plus facile de délimiter les frontières

Partant du principe que c’est un ÉCHANGE, tu sais que tu dois apporter des réponses aux questions de ton interlocuteur et l’aider à atteindre ses objectifs, comme lui t’aide à atteindre les tiens.

Dans ma vision, quand je parle de fixer ses objectifs, je parle surtout de délimiter les frontières de chacun.

C’est en lien direct avec mon deuxième conseil qui t’encourage, d’une part à poser tes limites, et d’autre part à oser prendre ta part du gâteau. 

 

Mais surtout avec cette notion d’ÉCHANGE tu te rends compte qu’il va falloir que tu saches… quels sont les objectifs de ton partenaire !

Il faut donc que tu fasses un travail de prospection pour savoir QUI est la personne et l’entreprise avec qui tu vas négocier.

illu-bleue-longuevue

Qui est le label en face de toi ?

Quelle est l’histoire du label ? Qui a créé l’entreprise ? En quelle année = dans quel contexte ? Quelle est sa forme juridique ? (signer avec une asso ou avec une société qui a 100.000€ de capital social ce n’est pas la même chose, leurs objectifs ne sont pas les mêmes, les enjeux sont différents).

Quelles sont les valeurs “affichées” ? Qui sont les artistes produits ? En connais-tu personnellement ? l’esthétique musicale ? Quelles sont les collaborations en cours ? les projets à venir ? les ambitions ? les difficultés financières (!!) ?

Quelle est la politique commerciale du label ? son réseau à l’étranger ? Le label a-t-il plusieurs activités (par exemple, producteur de disques + éditeur musical) ?

Etc.

Qui est la personne en face de toi ?

Parce que même si tu négocies “avec un label”, en réalité tu négocies avec un humain, pas (encore) avec un cyborg. Donc que sais-tu de cette personne ?

Son nom ? homme/femme ? Âge ? Sa position dans la société ? Depuis combien de temps est-elle dans la société ? Est-ce le fondateur ? l’associé ? l’employé ? Quel est son parcours professionnel ? Ses études ? Est-elle musicienne également ? Quel instrument ? De quelle région est elle originaire ? Ses hobbys ? Ses passions ? Quel genre de musique écoute-t-elle ?

Etc.

OUI, ça s’appelle une ENQUÊTE. Et c’est ce que je te conseille de faire.

Et aujourd’hui, rien n’est devenu plus facile :

Facebook, Linkedin, Twitter, Instagram, Pinterest, Blogs, Sites d’information spécialisés, Soirées, Salons professionnels… tous les moyens sont bons pour obtenir des renseignements !

Les avantages de bien connaître ton interlocuteur

Si tu prends le temps de mieux connaître l’entreprise et la personne que tu vas rencontrer :

1 – Tu pourras alors vérifier que tu es en phase avec ses projets et ses valeurs ; et vérifier que l’entreprise saura être le soutien dont tu as besoin.

2 – Tu auras plus de chances de pouvoir utiliser une information importante, voire décisive lors du rendez-vous. Parfois il suffit d’un mot ou d’une phrase pour faire pencher la balance d’un côté ou d’un autre.
(Tu as appris qu’en face de toi la personne est fan de pêche sportive ? Essaie de caler dans une phrase le mot “poisson” ou “pêcher” et observe l’éclair dans les yeux de la personne… #histoirevraie).

3 – Et surtout, autre conséquence, peut-être la moins palpable, la moins juridique mais je pense parfois la plus déterminante : plus tu as pris des renseignements sur le label et la personne en face de toi, plus tu te sentiras à l’aise et en confiance pendant le rendez-vous.

Parce que ce n’est pas un mystère, plus on connait quelque chose, plus elle nous semble familière, moins elle nous semble effrayante. Et donc, plus tu es en confiance, moins tu stresses, plus tu es disposé·e à bien négocier, plus tu attireras la sympathie, plus tu seras à l’écoute des autres, et surtout plus tu seras à l’écoute de ton intuition et de ta raison.

En résumé :

Voilà les conseils que je voulais partager avec toi. 

Je sais que souvent on stresse avant un rendez-vous ou une négociation. Beaucoup d’artistes ou leurs managers ont vraiment peur de se faire avoir, de se faire piéger.

Mais, à mon sens, ce n’est pas vraiment par la technique et le juridique que tu évites les “arnaques”. C’est en amont.

En te préparant et en adoptant le bon état d’esprit ! Et maintenant, tu as une idée de comment faire :

En osant poser des questions tant que tu n’es pas sûr·e à 100% d’avoir tout compris

En prenant le temps de bien poser ton intention & définir tes objectifs en signant cet accord

En comprenant quels sont les objectifs du label avec qui tu veux signer, et vérifier qu’il y a cohérence et adéquation entre vos projets respectifs

picto-jaune

 

Si tu as besoin d’aide pour déchiffrer un contrat que tu as reçu, sache que je propose des consultations individuelles pendant lesquelles on décortique le contrat ensemble pour que tu puisses être sûr·e de comprendre ce à quoi tu t’engages.

 

N’oublie pas que j’ai rédigé un Guide de négociation pour t’aider à identifier les Questions les plus importantes à se poser face à un contrat dans la musique. 

Et si tu veux aller un peu plus loin et poursuivre ton exploration du Monde professionnel de la Musique, tu peux rejoindre mon cours Accord Parfait, sur la circulation de l’argent dans la musique.

 

 

👉 Par ici pour lire mon 4e et dernier conseil pour bien négocier !

 

Si tu as des questions, des remarques, un partage d’expérience : n’hésite pas à laisser un COMMENTAIRE sous l’article 👇

Et à cliquer sur le 💛 si ça t’a été utile !

Pour aller plus loin :

Tu es sur le point de signer un contrat ? Tu n’es pas sûr·e de savoir poser les bonnes questions ?

J’ai rédigé un Guide de Négociation spécialement pour toi : 10 QUESTIONS à (se) poser AVANT de signer un contrat

Tu veux comprendre comment l’argent circule dans la Musique ?

Je t’accueille avec plaisir dans le COURS EN LIGNE Accord Parfait

Tu as besoin de conseils personnalisés ?

Pour faire le point sur ta situation ou décrypter un contrat que tu as reçu.

Je propose des CONSULTATIONS individuelles personnalisées.

Un peu de lecture ?

De ta Passion, tu ne vivras Point.

Mon tout premier recueil.

J’y parle d’argent, de création, de liberté, de Dieu, de complexes, d’interdictions, de fantasmes, d’erreurs, de nunchaku, de petits pois… et de passion !

Article rédigé par Jennifer ESKIDJIAN
Article rédigé par Jennifer ESKIDJIAN

Juriste ~ Formatrice en Droit de la Musique
Fondatrice du site à ContreTemps

À Propos

Tu penses que cet article peut être utile à quelqu’un ? Tu es libre de le partager :

LinkedIn
Twitter
Facebook
Reddit
Telegram
Tu veux rester connecté ?

Si tu veux recevoir des infos, des réflexions et ressources utiles sur le droit et le business de la musique… je t’accueille avec plaisir dans la Newsletter !

Tu peux t’inscrire juste ici ►

.
Les commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

D'autres articles à lire :

[ Je reprends une série d’articles que j’avais commencée sur le site Droit de la Musique. Elle portait sur les QUESTIONS auxquelles j’avais été et

Lire la suite »

Comment approcher le Droit de la Musique quand on trouve ça ennuyeux et trop abstrait ?
Je te donne quelques clés pour savoir par où commencer.

Lire la suite »

Table des matières Tu as besoin d’un coup de pouce pour financer ton album ? Besoin d’argent pour enregistrer, payer les musiciens, ou bien pour

Lire la suite »